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  • Photo du rédacteurSarah Adida

Carnet de voyage: Tel-Aviv, la cosmopolite

Après la majestueuse Jérusalem, et la visite des villes de Bethléem, Hébron et Ramallah, me voici à nouveau de retour pour quelques jours sur la « colline du printemps », de son nom hébraïque, Tel-Aviv.

Les jours de mai respirent ici déjà la saison estivale : dès mon arrivée, je me rue sur les longues et belles plages de sable fin, qui font de Tel-Aviv une destination balnéaire de choix pour de nombreux touristes israéliens et étrangers. Nous sommes à peine à la mi-printemps, et les plages sont déjà pleines !

Ce qui me surprend d’abord- alors qu’il y a seulement quelques jours, je déambulais sur les plages de Casablanca- c’est l’extrême sensualité qui règne ici… Sur la longue promenade qui jouxte la plage, tout le long de la ville, étendue sur plusieurs kilomètres, les peaux sont dénudées, décomplexées, exposées. A tel point qu’il n’est plus choquant de marcher en maillot de bain dans les rues situées aux alentours des plages. Les attitudes qui pourraient être jugées comme impudiques ailleurs, entre les couples, sont ici naturelles et normales. La saison chaude, pourtant à peine commencée, exacerbe les sens et les sensualités, consacrant le corps, et donnant à la ville un goût de liberté absolue que je n’avais jamais encore goûté dans aucun de mes voyages… J’ai pourtant largement écrémé les villes balnéaires méditerranéennes d’Europe !

Ici, on n’a pas besoin de mots pour ressentir ceci : il est interdit d’interdire… Chacun dispose de son corps et de sa sexualité comme il l’entend. La vie nocturne me confirmera un peu plus tard cet adage instinctif !


Après quelques délicieuses heures de baignades et farniente sur le sable, je décide pour le déjeuner de partir à la recherche de produits frais dans le fameux marché Carmel. Situé dans le quartier yéménite, c’est le marché le plus riche en couleurs et le plus animé de la ville. Etalages abondants, vendeurs à la criée, on trouve fruits, légumes bien sûr, mais aussi spécialités israéliennes (pâtisseries, pains spéciaux et brioches), les fameuses dattes, noix et autres fruits secs, fromages et poissons. Malgré le côté abondant, je remarque que les prix des denrées sont relativement chers, comparées aux tarifs européens ou marocains. Les fruits surtout, sont hors de prix : près de 3,50 euros un kilo de pommes !

« Ici, il faut vivre à « l’israélienne » : c’est un petit pays qui doit importer beaucoup de produits alimentaires, ce qui augmente les prix. On ne peut pas acheter en grande quantité, ni faire la fine bouche ! Il faut s’adapter aux produits les moins chers qui ne sont pas importés, comme les légumes, certains fruits, et essayer de se passer des autres produits dont on avait l’habitude en Europe ! », m’expliquera par la suite Laura, une amie française installée depuis quelques années à Tel-Aviv.


Après m’être concocté une délicieuse salade israélienne (tomates, concombres, oignon, poivrons), agrémentée de tehina (purée de sésame) et de fromage cottage sur une pita, je décide de partir marcher sur la promenade jusqu’au port de Jaffa (Yafo), qui constitue la vieille ville historique de Tel-Aviv, le quartier où les origines arabes sont les plus marquées.

En arrivant à la tour de l’horloge, je découvre d’abord le marché aux puces installé dans des ruelles bâties dans de lourdes pierres. Ici, le soir, certaines ruelles s’illuminent par leurs nombreux et charmants cafés et restaurants, dont les terrasses accueillent la jeunesse israélienne et étrangère de la ville, pour des soirées animées et festives. Un peu plus loin, en montant les marches depuis le port, j’arrive sur la place Kedumim, aux pierres pavées et bordées de marchands de souvenirs, avec un air de la place du Tertre de Paris Montmartre ! Musées, galeries et marchands d’objets d’art et d’antiquités sont incrustés à chaque ruelle ancienne pavée, comme autant de secrets au cœur d’une vieille ville suspendue et accrochée à sœur moderne et voisine, Tel Aviv.


Avant de redescendre, je savoure d’abord la sublime vue depuis la hauteur des jardins HaPisgah, sur les longues plages du nord.

Avant de retourner au centre de Tel-Aviv, je m’arrête, intriguée, devant une pâtisserie indiquant dater du début du 20è siècle. Le marchand m’explique que les propriétaires, du nom de Aboulafia, détiennent cette pâtisserie depuis plusieurs générations. « C’est un nom d’origine palestinienne, comme la ville était peuplée par les arabes au début du 20è siècle, jusqu’en 1948 * (1) », raconte-t-il, en me servant une part de « halva » aux amandes et pistaches, parmi les nombreuses autres pâtisseries orientales.

Depuis le Port de Jaffa, j’emprunte une bicyclette en location – en libre-service, comme le font de nombreux habitants de la ville- sur les larges pistes cyclables de la promenade, afin de retourner au centre ville, où m’attend la visite du quartier Rotschild, jusqu’aux rues Sheinkin et Allenby. Au cœur d’un quartier avant-gardiste, peuplée de galeries d’art, de boutiques branchées voire chics, c’est ici que se fréquente et se rencontre la jeunesse de Tel-Aviv. Cafés confortables et chics, boutiques artisanales et rues piétonnes, sont installés au pied des architectures Bauhaus *(2). Ce style d’architecture d’origine allemande s’est développé dans la ville à partir des années 1930, introduisant un style de bâtiments aux toits plats, lignes horizontales et murs blancs. Sur les 4000 bâtiments blancs de ce style, un millier est déjà inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2003.


Cet aspect « Ville blanche », apposé aux nombreuses boutiques chics et cafés huppés, donnent au quartier un aspect bohème et parfois bourgeois, assez élégant et agréable!

Le soir venu, je m’amuse à un petit test : courtement vêtue, je m’élance à près de minuit dans les rues de Tel-Aviv, à la recherche d’un bar ou d’un club branché, où écouter de la bonne musique. On m’a tant vanté la vie nocturne de l’électrique Tel-Aviv !

Alors que, marchant seule, je croise plusieurs hommes (ou femmes), aucun ne m’adresse la moindre parole déplacée, ni la moindre remarque, et encore moins de geste ou tentative de drague à mon égard…

« Le harcèlement à l’égard des femmes est ici si sévèrement puni et règlementé, que rares sont les hommes qui se risquent à adresser la moindre parole ou geste déplacé à une femme, quelque soit sa tenue vestimentaire ou bien l’heure à laquelle il la croise… » me raconte mon amie Laura.

J’ai finalement choisi un bar-boîte, dans le quartier centre-sud : après plusieurs minutes à l’intérieur, je m’aperçois que le lieu, sans le dire, est largement « gay-friendly ». Tel-Aviv est par ailleurs réputé pour sa liberté sexuelle à ce niveau. Liberté, un mot sacré ici, a contrario de sa cousine Jérusalem…


Ville de jour vibrante de modernité et de création artistique, technologique ; ville de nuit électrique, ininterrompue, et branchée sur la liberté des sens, des corps et des esprits... Religieux, traditionnalistes et laïcs coexistent ici en toute tolérance, dans une harmonie surprenante.


Demain je partirai à la découverte de la ville historique de Césarée, ancienne ville romaine ; avant de gravir les pavés de l’inénarrable Nazareth.

Depuis la colline du printemps et de la liberté, je vous embrasse.



Sarah



* (1) : Fin 1947, alors que les Britanniques s’apprêtent à quitter la Palestine, les tensions ne font qu’amplifier entre juifs et arabes à la frontière de Jaffa. En 1948, Jaffa fut prise d’assaut par les forces juives et la plus grande partie des habitants arabes fuirent la ville en direction de Gaza ou Beyrouth.

*(2) : Le Bauhaus est un institut des arts et métiers fondé en 1919 à Weimar en Allemagne, par Walther Gropius. Son but est de regrouper l’art, l’artisanat, le design et l’architecture pour former un art pluri-disciplinaire. Le centre de Tel-Aviv compte plus de bâtiments de ce style que n’importe quel endroit au monde. Ses préceptes furent introduits en Palestine par des architectes juifs allemands ayant fui le régime hitlérien.

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